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Café de la Poste

Mémoire d'établissements Horeca

L’ancien „Café de la Poste“, au N°19 rue Philippe II, à Luxembourg, existait déjà en 1869. Il fut un des premiers établissements à ouvrir au lendemain du départ de la garnison prussienne en 1867.

En 1869, la forteresse fut encore largement en place, car l’aliénation des anciens domaines militaires ne fut autorisée qu’à partir de mai 1868. L’aménagement des boulevards ne commençait qu’en 1871. Le commerce local était alors fortement marqué par la production artisanale, et l’exercice de plusieurs métiers en même temps continuait à caractériser l’esprit entrepreneurial. Ainsi François Weymann, qui exploitait le Café de la Poste à cette époque, y tenait également une épicerie.

Au centre de tous les magazines satiriques du pays

L’emplacement du Café fut stratégique, car il était situé à proximité de la place d’Armes et donc de l’ancienne garde principale de la forteresse où la milice « Jägerbataillon » était installée de 1868 à 1881. Il faut toutefois se rendre compte, que la place d’Armes n’a pris sa fonction de « salon de la capitale » (Batty Weber) qu’à partir de 1875 seulement, et que le Café de la Poste était l’un des plus proches pour les recrus du bataillon pour se détendre après l’exercice de leur fonction. La Banque Nationale (1873-1881) touchait directement la propriété du Café de la Poste. A l’hôtel du Génie (emplacement de l’hôtel des Postes, rue Monterey) étaient logés, à cette époque, la Poste, le bureau de la douane, l’administration du cadastre et la Chambre des Comptes. Ce n’est qu’à partir de 1883 que l’administration des P & T occupe cet emplacement en exclusivité.

Cette situation centrale et cette proximité d’un nombre élevé d’emplois, laisse supposer pourquoi l’»Association des ex sous-officiers » et la fédération des employés « Handlungsgehilfen-Verband » choisirent en 1889, respectivement en 1906, le Café de la Poste comme lieu de fondation de leurs syndicats. Choisir ce café pour fonder une association sydicale, lui atteste un caractère évidemment populaire. L’établissement fut ainsi régulièrement cité comme théâtre de la vie publique et politique dans les magazines satiriques luxembourgeois : « Duoreg Zongen », « De Letzeburger, humoristisch-satirisches Wochenblatt », « Der arme Teufel », « De Mitlock- Wocheblad fir Jux an Zodi », « d’Wäschfra ».

Pendant les années de guerre, l’Occupant obligeait Christophe Bintner à qualifier officiellement son Café de « Arier – Lokal ». Alors que la fin de la guerre approchait avec l’entrée des troupes soviétiques dans Berlin et que s’effectuaient les premières évacuations de camps de camps de concentrations, le nouveau propriétaire, la famille Bollich annonçait par une fête de trois jours (19-21 avril 1945) la reprise du café de la Poste à son compte.
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Bien plus qu’un débit de boisson et lieu de détente

Il est par ailleurs rapporté que dans les années 1920, l’exploitant du Café, Jean Reuter, serait sorti en rue pour inviter de façon spontanée des clients et passants à venir savourer ses bières. La popularité de la maison lui valut aussi d’être cité comme référence de voisinage pour des commerces situés à proximité. L’établissement répondait également à sa fonction sociale en servant, dès 1880, de bureau de réclamations pour le service des gaz de la ville de Luxembourg, respectivement d’agence pour la location de meublés et même comme lieu de ventes publiques pour des biens immobiliers.

La flambée des prix ne date pas d’aujourd’hui

L’immeuble qui logeait le Café de la Poste entre 1869 et 1883 était vaste et fort apprécié pour son « Gesellschaftslokal ». Il comprit une maison d’habitation avec dépendances et une entrée séparée à la rue Philippe II. Côté avenue Monterey, la propriété touchait à l’époque au terrain l’actuelle Cour des Comptes. En 1890, la publicité pour la vente de l’immeuble soulignait la situation idéale pour une exploitation commerciale. Les ventes successives entrainaient un morcellement de la propriété. L’ouverture de la ville après 1867 et le raccordement de la rue Philippe II via l’avenue Monterey à la route de Longwy (aujourd’hui avenue du X Septembre) avaient valorisé l’emplacement. Pendant la construction du nouvel immeuble au coin, le Café de la Poste déménageait au N°16, rue Philippe II en prenant le nom d’ »Estaminet de la Poste ». Lorsqu’en 1893, le cabaretier Sigisbert Jentgen rouvrait le Café de la Poste à son emplacement original, l’immeuble neuf arborait fièrement une façade aux décors historisants. Une tourelle en encorbellement soulignait maintenant la situation en angle de rue et conférait à l’immeuble une visibilité accrue. Jentgen annonçait à la même époque que la façade du Café allait être ornée de „prächtige Spiegelscheiben“.

La Obermosel-Zeitung reconnut la valeur galopante du terrain en fonction du développement de la ville et de l’emplacement comme hyper-central: « Die Mietweise, besonders für Häuser in guten Lagen, so an verkehrsreichen Ecken, sind hier in stetem Steigen begriffen. So ist das an der Ecke Philipp- und Montereystraße gelegene Haus, in welchem Hr. Jentgen sein vielbesuchtes Cafe de la Poste (…), für weitere sechs Jahre für 1900 Fr. vermietet worden: Hr. Jentgen bezahlt bisher einen Mietpreis von 1300 Franken.“ La valeur de l’immeuble ne cessait d’augmenter „wegen des in Aussicht gestellten Brückenbaus“ (Luxemburger Wort, N° 13, 1899). L’ouverture du pont Adolphe en 1903 entraînait effectivement un développement considérable de la partie ouest de la ville haute. En 1926, les premiers feux de circulation furent installés au carrefour rue Philippe II / Grand’Rue. Début des années 1930, Christoph Bintner, allait moderniser sa façade pour mieux s’adapter à la nouvelle construction qui fut élevée en face de sa propriété (N°21). La tourelle en encorbellement échappa à cette vague de sobriété et de lignes géométriques, comme l’atteste la situation toujours.

Kuddelfleck et bières locales

En 1890, le Kuddelfleck de Sigisbert Jentgen fit la réputation gastronomique du Café de la Poste. En 1900 il servait de la bière de Diekirch. Jean Reuter s’était à son tour spécialisé dans le débit de bières luxembourgeoises. En 1930 Christoph Bintner, ancien gérant du Café Metropole, participait activement à la « Weinwoche » et annonçait régulièrement l’arrivé de «vins 1ers crus ». Deux ans plus tard il annonça dans la presse : „Da mit dem belgischen Bier nicht der erhoffte Erfolg erzielt wurde, ist der rühmliche bekannte « Mousel-Pilsen » wieder hier „ (Luxemburger Wort, 14 septembre 1932,p.5.) L’établissement restait fidèle au «Echtes  Pilsen Urquell » de cette marque luxembourgeoise jusqu’à la fin des années 1990, lorsque la maison avait pris le nom de « Café New York ».

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Historique