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Cloche d'Or

Mémoire d'établissements Horeca

Il y 80 ans un hôtelier inventait le nom d’un quartier de ville : « Cloche d’or »

L’entrepreneuriat hôtelier se montre créatif et inventif. En contact avec un grand nombre de clients et de passants, les cafés et les restaurants sont des incubateurs d’idées.

Un hôtelier invente le nom d’un quartier

Le carrefour entre la route de Bettembourg et la route d’Esch accueillait depuis 1908 le Café Weber-Hebber. Michel Weber avait exploité jusqu’en 1884 l’Hôtel du Commerce à l’Avenue de l’Arsenal. Epoux d’Anne Hebber, sage-femme, le père d’une famille nombreuse habitait à proximité de la rue de Strasbourg, avant de vendre, en 1908, sa maison spacieuse sise entre la rue d’Anvers et la rue de Strasbourg. Il ouvrait le Café de villégiature « Gartenwirtschaft » « Weber-Hebber » à la route d’Esch à hauteur du « Cessingerberg ». Situé à proximité des promenades de la Kockelscheuer le Café proposait en un jeu de quilles comme distraction. Le raisin représenté sur la façade indique que son établissement servait sans doute avant tout des vins rafraichissants. Michel Weber s’éteint avant 1920, année du décès de son épouse.

L’hôtelier, Gehardus Marx, ouvrait le 16 mai 1937, au « Scharfen Eck », une auberge avec jeu de quille moderne et restaurant. Le nom de « Cloche d’Or » (N°406 route d’Esch) allait bannir le toponyme « Scharfen Eck » au relent de carrefour dangereux. En 1984, au moment de l’aménagement de la zone industrielle, commerciale et de bureaux, tout ce nouveau quartier allait prendre le nom de « Cloche d’or ». A l’heure actuelle, la dénomination est progressivement reprise pour désigner également les nouvelles rues du quartier « Ban de Gasperich ». Déjà en 1816, une auberge située au marché aux Poissons avait porté le nom de « Gëlle Klack ».

« Gestuerwe fir d’Hémecht »

L’hôtel de style moderniste se situait en rase campagne, non loin du village périurbain de Gasperich. La situation était idéale à proximité de la ville, et au carrefour entre les routes d’Esch et de Bettembourg, soit les axes centrales entre la capitale et le bassin minier. Avec son parc, et son restaurant servant la cuisine bourgeoise, la clientèle se régalait de truites fraîches, de savoureux poulets à la bresse, on y savourait la bière « Mousel ». En 1939, les nouveaux propriétaires Marguerite Seywert et Nicolas Hausemer s’adressaient en luxembourgeois à leur clientèle pour leur servir « e gudde Patt ee seffege Wein dat beseet wat eis Musel huet ». Ils proposaient des soirées dansantes, des bals masqués. « Den Tanz kascht neischt“ clamait la publicité (Tageblatt 18 fév 1939). Cette envolée pour le luxembourgeois s’expliquerait-t-elle par l’ambiance autour des fêtes pour les 100 ans d’Indépendance du Luxembourg et la menace de l’occupation ? Les traces se perdent pour l’exploitant à partir du 9 août 1940. A la fin de la guerre, le 27 février 1945 l’Unioun Zéisséng publia l’annonce de décès de Nicolas Hausemer « Member vun der Unio'n, geb. zo'Letzeburg den 12. juni 1898, gestuerwen fir d'Hémecht am KZ zo' MAUTHAUSEN (Guesen) de 27. 2. 1945 ».

Le plan d’aménagement de la ville, dressé en 1943 par Hubert Ritter prévoyait au sud de Gasperich une zone de loisirs avec stade et autodrome. Avec l’ouverture d’une piscine en plein air et d’un hall de squash, un brin de ces idées semblait s’être concrétisé des décennies plus tard.

Le 1er décembre 1945, l’Hôtel de la « Cloche d’Or » rouvrait sous son ancien nom. Le nouveau propriétaire cherchait rapidement du personnel pour les services de cuisine, le jeu de quilles, pour garantir des travaux domestiques. En 1963, la maison proposait 11 chambres et un restaurant, des emplacements pour garer ses voitures, un jardin. Un nouvel élan fut pris en 1973, au moment où l’hôtel rouvrait, sous le nom de « Gran Vatel » en proposant désormais 22 chambres avec douches ou salles de bains. Le Guide Michelin Benelux de 1975 les signalait comme « aménagées avec goût ». Le nom de « Gran Vatel » rappelait la mémoire du pâtissier-traiteur et maître d'hôtel français, François Vatel surintendant des Finances de Louis XIV et grand organisateur de fêtes et de festins fastueux. Marcel Wilmes représentait l’établissement au sein de la prestigieuse Chaîne des Rôtisseurs. En 1976, le restaurant « Gran Vatel », lançait en collaboration avec la Fédération des Associations Viticoles du Grand-Duché de Luxembourg, une semaine de spécialités luxembourgeoises et des soirées musicales. Marcel Wilmes avait également mis au point un apéritif à base de vin mousseux luxembourgeois. La soupe aux poireaux et croûtons, la truite au Riesling, les écrevisses à la luxembourgeoise et le porcelet avec pommes de terre en ragoût comptaient parmi les plats les plus appréciés. La sàrl « Gran Vatel » ne fut dissoute qu’en 2004. Le restaurant avait été repris en 1981 par Ramon Sanchez qui y allait servir des spécialités espagnoles avant de s’établir à Strassen sous le nom de «Restaurant la Dorada ».

« Ma plage » et Squash d’or

Jusqu’en 1867, la ville offrait au Grund aux soldats de la garnison des bains de rivières. Le projet de mise en place d’une piscine à ciel ouvert demeure jusqu’à nos jours une initiative privée, initiée à Gantenbeinsmuhle (1933) Izigerstee (1934) et à Dommeldange (1954). La piscine « Cloche d’Or » créée à cette même époque, attirait la jeunesse citadine qui s’y rendait même en bus spéciaux. En 1958, le service d’hygiène de l’eau louait la Piscine de la Cloche d’Or pour ses installations de filtrages et la fit ranger avec Differdange, Dudelange et Mondorf-les-Bains parmi les meilleures installations du pays. Avec ses rangées de cabines, sa terrasse ensoleillée avec bar à glaces, la piscine fut un lieu privilégié de bons moments pour la jeunesse, les familles, mais aussi de nombreuses associations sportives. Rouverte en 1963, après des travaux de modernisation, et sous le nouveau nom « Ma Plage », elle fut exploitée par Albert Stoltz, qu’on connaît également comme « Vice-Président des Anciens Combattants de la Guerre 1939-1945 et des forces des Nations Unies ». En 1976, l’établissement qui proposait également un petit restaurant avec vue sur bassins, fut sponsor du Euro Racing Team. Cependant, l’année suivante, Albert Stoltz annonçait s’avoir spécialisé dans la vente d’équipement pour piscines, car de plus en plus de clients aménageaient leurs propres bassins privés. Il allait transférer son entreprise à Olingen.

L’offre de loisirs que représentait la piscine allait être relayée par le hall de sports de raquette « Squash d’Or, inauguré en 1977, sur la parcelle voisine de l’hôtel. Le dernier bilan de cette société fut déposé en 1992. A partir de cette date, l’annuaire des abonnés au téléphone ne mentionne plus ni le restaurant, ni la piscine, ni le Squash d’or. Une époque était révolue.

Un nouveau quartier de ville se dessine

Dès le premier coup de bêche donné en 1968 pour la construction du contournement, la situation de l’hôtel et de la piscine à la Cloche d’Or allait changer. Depuis 1974, l’autoroute d’Esch achevée sur l’ensemble de son tracé, assure la jonction avec la deuxième ville du pays à partir de Hollerich. Des projets de construction d’échangeurs à la hauteur de la « Cloche d’Or » et de directions différentes à donner aux nouvelles autoroutes en projet, plaçaient les propriétaires dans une situation incertaine. Les abords de Gasperich accueillaient dès 1976 les premières entreprises artisanales et commerciales. En 1984, le projet de construction d’un immeuble « interprofessionnel » présenté d’après les plans de l’architecte Pierre Bohler à l’emplacement de l’ancienne piscine, lançait le projet d’extension de la zone d’activités qui fut inaugurée en 1988. En 2003 une deuxième extension de la zone eut lieu en direction de la Drosbach. Quelques vestiges de l’ancienne piscine en plein air étaient encore visibles en 2005. (Rolph)


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