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Hôtel Kons

Mémoire d'établissements Horeca

Hôtel Kons – le plus grand hôtel lors du Millénaire de la ville

Les alentours de la gare de Luxembourg (1859) ne connurent de destin économique que suite à la suppression de la forteresse en 1867 et au démantèlement de ses ouvrages militaires. Dès 1872, des industries et manufactures s’établissaient en face de la gare, pour profiter directement des relations ferroviaires. Dans ce sillage, qui prit de l’ampleur dans les années 1880-90, on trouve le futur Hôtel Kons. Les terrains lotis sous l’impulsion de l’ingénieur Jean Worré étaient profonds afin de permettre aux entreprises industrielles de vaquer à leurs affaires et d’aménager leur site de production suivant leurs besoins.

Marché de bétail et bureau de change

Les origines de l’Hôtel Kons remontent au Café Restaurant Kaiffer-Sturm qui dès 1893 profitait à son tour de ce pôle d’échange que représente la gare. Le terrain qu’occupait l’établissement comprenait une importante cour intérieure, de nombreuses étables, des dépendances avec logements. Les écuries, avec service de palefrenier, furent mises à disposition de marchands ambulants de bétail, qui venaient de la campagne vendre chevaux, porcs et veaux sur les marchés de la ville. D’autres concluaient leur marché sur place, dans le but d’exporter les animaux directement sur les marchés de l’Union douanière allemande, dont faisait partie le Luxembourg et de profiter des facilités d’embarquement du bétail dans des trains de marchandises. En 1921, 1000 wagons livraient du foin italien au « Kons » pour y être mis en vente publique. La vente de pommes de terre en gros, d’eaux de vie se faisait également sur la place privée de l’hôtel. Au Café, les notaires organisaient des ventes d’immeubles souvent situés en campagne. L’établissement assurait ainsi un lien entre la ville et la campagne. Tout ce négoce se passait de façon discrète dans la grande cour entourée des écuries et fermée par une porte cochère. Au premier étage du Café-Restaurant fonctionnait un bureau de change, facilitant le commerce sur place. L’entreprise poursuivit ce genre d’activités jusqu’en 1932.


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Être à la disposition du voyageur pressé

Le champ d’activité allait s’élargir lorsque le café-restaurant fut transformé en 1902 en « Hôtel restaurant de la Gare Kons-Haas ». Pierre Kons vendait en 1903 une partie des étables pour financer l’aménagement de 22 chambres d’hôtel. L’établissement visait les voyageurs de chemin de fer en leur proposant des repas « à toute heure » et « à des prix modérés ». Aux clients pressés, il offrait également un service retouches. L’hôtelier autorisait des commerçants ambulants à vendre leurs produits pendant leur séjour à Luxembourg. En 1914, la maison subit quelques endommagements suite à des obus tombés sur le quartier. Kons donna à ce moment son établissement en location. La salle du Café modernisée en 1927 fut prisée par les sociétés locales populaires, dont le « Volksbildungsverein » ou « Garten und Heim » pour leurs réunions, assemblées et conférences. Des orchestres exclusivement étrangers assuraient des soirées agréables. La fermeture de l’établissement, en 1934, pour raisons de démolition fut l’occasion pour le locataire, Albert Wengler, de vendre le mobilier de 40 chambres d’hôtel, un jeu de quilles, l’équipement de cuisine.

Premier « Roof-Garden » du pays

Suite à l’ouverture de l’Hôtel Alfa en 1932, le temps était venu de proposer un tout nouvel établissement. Pierre Kons chargea en 1933 Nicolas Schmit-Noesen, le futur architecte du pavillon luxembourgeois à l’Exposition Universelle de Paris (1937) des projets pour la construction d’un tout nouvel hôtel. Noesen avait fait régulièrement preuve d’un engagement courageux pour l’architecture moderniste à Luxembourg. Le caractère résolument moderne de l’immeuble ne se reflétait pas uniquement au niveau des formes et de la sobriété des décors de la façade avec son jeu savant de formes géométriques et de volumes. S’inspirant du Bauhaus, déjà interdit à l’époque en Allemagne, cet hôtel saluait le visiteur étranger dès sa sortie de la gare. Construit au bout de seulement 8 mois, sa structure en béton et en acier fit l’éloge au savoir-faire de l’industrie luxembourgeoise. L’immeuble offrait le tout premier « roof garden » du Luxembourg que seule une dalle en béton avait permis de réaliser. Un ascenseur en facilitait l’accès.

L’hôtel se vantait comme étant un immeuble complètement insonorisé, face au bruit des locomotives. Chaque chambre disposait d’eau courante, la plupart jouissait par ailleurs d’une salle de bain privée. Chacune des 100 chambres était raccordée au téléphone. Des salons de conférences furent proposés au premier étage, soulignant le caractère d’affaires de l’établissement. Schmit-Noesen fit de l’établissement également un dispensaire de lumières grâce à l’éclairage néon qui recouvrait l’entièreté des façades. La nuit, l’établissement ne passait pas inaperçu.

La brasserie plongeait ses clients dans une ambiance feutrée d’éclairage indirecte. Le chef de cuisine, recruté en France, proposait des hors d’œuvres, des plats froids et servait les meilleurs crus du pays, ainsi que la bière Mousel et la Dortmunder Union. Tout plat restait à « prix modéré». « Kons » proposait par ailleurs, un service coiffeur, un magasin de tabac et un magasin de journaux aménagés dans des espaces donnés en location à la rue Joseph Junck.

Le plus grand hôtel de la ville

De 1948 à 1958, la place de la gare prit un caractère plus urbain grâce aux nouveaux immeubles Accinauto, CFL-Direction, Cinéma Eldorado, Hôtel Empire. De nouveaux agrandissements et modernisations de l’Hôtel Kons furent effectués en 1958 portant le nombre de chambres à 160. Lorsque la ville célébrait son millénaire, en 1963, l’hôtel fut l’établissement le plus important de la capitale.

La centralité du lieu revendique de nouvelles fonctions

De nouveaux établissements hôteliers amenaient des standards internationaux d’équipement, alors que le développement de la ville exigeait un autre concept économique pour ce lieu devenu central. L’hôtel cessait ses activités en 1988 et fut transformé, en deux phases, en centre commercial et administratif avec parking souterrain et logements. Bureaux et galerie marchande, conçus par les architectes Pierre Schumacher et Fiorenzo Cavallini furent inaugurés en 1991. En 2013, un nouveau projet de construction vit le jour proposant 14.600m2 de bureaux ; 2.400 m2 de commerces et 3.500m2 de logements. Le groupe m3 architectes signe les plans de ce projet. (Rolph)

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Historique